Julien Guénot (Axa XL) : "Toutes les capacités ne se valent pas"

lundi 13 octobre 2025

INTERVIEW - Julien Guénot, directeur d'Axa XL pour la France et l'Europe du sud, fait le point sur la campagne de renouvellements 2026. Entre tension géopolitiques et incertitudes commerciales, le dirigeant fait le point sur les évolutions tarifaires et insiste une nouvelle fois sur l’importance de la prévention.

Quelle est votre vision globale des renouvellements 2026 qui s’annoncent ?

2026 sera clairement une année de pivot pour les grands risques. Des tendances tarifaires claires se dessinent déjà. Globalement, les entreprises qui ont investi fortement dans la prévention et la gestion de leurs risques bénéficieront d’un large éventail d’options et d’offres élargies.

La notion de partenariat revêt ainsi une importance particulière. Les grandes initiatives de nos clients ne se réduisent pas à des projets économiques et nécessitent que nous nous engagions à leurs côtés avec un accompagnement à la hauteur de leurs ambitions. Cela suppose une collaboration étroite avec nos clients et leurs courtiers pour s’adapter à leurs enjeux.

Nombre de courtiers du marché annoncent anticiper une détente des tarifs et conditions de souscription en dommages, RC (hors US) et cyber. Faites-vous également ce même constat ?

La campagne des renouvellements 2026 est bien entamée et on observe déjà une tendance à la baisse dans la plupart des branches. Les tarifs restent néanmoins haussiers sur certaines lignes comme l’automobile. D’autres demeurent sous pression sur certaines zones géographiques comme les Etats-Unis.

Cette dynamique est soutenue par les résultats solides affichés par plusieurs grands acteurs et par un afflux de capacités sur le marché. Cependant, toutes les capacités ne se valent pas et se concentrer uniquement sur les conditions tarifaires serait une réponse de court terme.

De notre côté, nous privilégions une discipline de souscription sur le long terme avec le développement de solutions coconstruites avec nos clients et leurs courtiers, qui prennent en compte d’autres dimensions. Nous sommes particulièrement sensibles, encore une fois, aux investissements de nos clients en matière de prévention.

Les grands comptes semblent mieux loger que les ETI ? Pour quelle raison les plus petites entreprises seraient-elles plus en difficulté ?

Concernant les ETI, la situation est plus nuancée qu’elle n’y parait. Ces segments subissent une certaine pression financière qui peut limiter leur capacité à investir en prévention et, par conséquent, leurs options en termes de solutions assurantielles. Cela étant dit, les assureurs sont aujourd’hui nombreux à vouloir se positionner sur cette typologie d’entreprises.

C’est notre cas, mais de manière ciblée. Nous nous concentrons sur les ETI que nous sommes en mesure d’accompagner sur des activités où nous apportons déjà de la valeur sur les grands comptes, notamment les risques complexes et l’international.

Nous nous positionnons aujourd’hui pour accompagner les entreprises qui opèrent sur des industries de pointe ou à l’étranger. Pour servir ces clients, nous développons notre maillage au niveau régional pour aller à leur rencontre, notamment via des équipes de souscription dédiées.

Reste-t-il des secteurs industriels encore problématiques ? Si oui lesquels et avec quelle approche ?

Certains secteurs présentent encore des défis et nécessitent une approche adaptée. Cet accompagnement peut passer par une couverture traditionnelle, comme celles développées dans le cadre des renouvellements 2026, mais aussi par des solutions alternatives (captives, solutions structurées) ou par des solutions de marché via des pools : Assuratome pour le nucléaire, Garex pour les risques de guerre, deux groupements dans lesquels nous sommes fortement impliqués.

Au-delà de la capacité du marché à accompagner les entreprises via des solutions de transfert de risque pures, nous devons envisager quelles solutions nous pouvons mettre en place pour aider nos clients à mieux comprendre, anticiper et répondre à leurs risques, ce que nous appelons « predict, prevent, protect ».

Dans quelle mesure les tensions et la volatilité géopolitique perturbent-elles ces renouvellements ?

Les tensions géopolitiques sont sans aucun doute en toile de fond et exercent une certaine influence sur les renouvellements. Là encore, il convient d’être nuancé. Certains de nos clients souffrent de cette volatilité qui a pu impacter leurs résultats, ce qui les amène à vouloir optimiser, entre autres, leurs dépenses en termes de risk management et d’assurance. Nous l’entendons, néanmoins cette volatilité a également un impact sur le coût de certaines indemnisations. Lorsqu’il est plus cher de reconstruire après un sinistre, cela doit être pris en compte à la souscription, et ce, encore une fois, de manière ciblée, risque par risque.

Nous avons par ailleurs investi de manière considérable ces dernières années afin de pouvoir offrir à nos clients français des solutions visant justement à minimiser l’influence des tensions géopolitiques sur leurs activités, en développant notre expertise en risque politique et en violences politiques.

Quid des incertitudes commerciales – notamment sur l’activité transport – liées à la politique de Donald Trump ?

Dans l’activité transport, les évolutions récentes se traduisent par une réduction du volume de marchandises transportées et une redirection des flux logistiques. À court terme, cette dynamique pèse sur l’activité de nos clients et, à moyen terme, devrait conduire à un rééquilibrage des flux et des volumes.

Nous travaillons en étroite collaboration avec nos clients et leurs courtiers pour nous assurer que les couvertures reflètent ces évolutions et anticipent ce rééquilibrage. L’industrie maritime est par ailleurs sous pression pour atteindre la neutralité carbone, avec des objectifs ambitieux fixés pour 2030. Nous accompagnons les grands acteurs dans leurs investissements de transition, notamment en matière de propulsion nucléaire ou de solutions alternatives comme le transport à la voile, illustrées par des initiatives telles que TransOceanic Wind Transport (TOWT).

Notre objectif est de contribuer à sécuriser la continuité opérationnelle tout en soutenant l’innovation et la résilience de la chaîne d’approvisionnement.

La mise en place de programmes internationaux est-elle rendue plus complexe dans cet environnement mouvant ? Quels pays tirent-ils leur épingle du jeu ?

Les programmes internationaux sont, par définition, complexes, ce qui expliquent que peu d’acteurs sont présents sur ce marché. Nous maintenons une veille constante sur l’évolution des règlementations dans les territoires où nous accompagnons nos clients, afin d’anticiper les risques et d’apporter des solutions durables. Nous collaborons de manière proactive avec notre réseau pour garantir un niveau de service élevé et fiable, à chaque étape.

Par ailleurs, nos clients multinationaux ont une approche de la gestion du risque très sophistiquée et sont de plus en plus demandeurs d’outils leurs permettant d’avoir une vision plus précise de leurs risques, en temps réel. C’est un domaine dans lequel nous investissons et nous venons justement de lancer un portail destiné à ces clients qui leur permettra de simplifier la mise en œuvre et le suivi de leurs programmes internationaux.

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