Nicolas Denis (Crédit Agricole Assurances) : "Sur les taux, les tensions sont inévitables"
[INTERVIEW] Pour News Assurances Pro, Nicolas Denis fait un tour d'horizon des principaux enjeux de Crédit Agricole Assurances. Le directeur général de l'entité revient également sur le risque des taux.
En épargne, le second semestre affiche une collecte nette inédite. Avez-vous déjà réfléchi à une tendance de votre politique de rémunération ?
Le fonds en euros reste attractif, avec une collecte nette de 4,4 milliards d’euros. Nous maintenons un rendement régulier et sécurisant pour les clients d’année en année, avec des avantages successoraux et une diversification prudente. Nous sommes capables de gérer la volatilité et les crises grâce à la taille et à la structure de notre portefeuille. On suit avec attention évidemment la baisse des taux d'épargne réglementée. Même si l’assurance vie et l’épargne réglementée ne sont pas des produits assimilables, dans l’imaginaire des Français, ils le sont. Il est encore tôt pour les taux, mais nous sommes sur des tendances qui sont plutôt en légère inflexion. Nous ne nous sommes pas encore penchés sur le maintien ou non de notre politique de bonification. Nous verrons comment les concurrents se prévalent de ça.
Quel sera l’impact de Milleis Vie dans votre activité ?
Milleis Vie devrait faire progresser les encours de notre filiale Spirica de 3Mds d’euros (contre 15Mds d’euros actuellement, ndlr). Cette acquisition vise à développer l’épargne patrimoniale et toucher une clientèle plus fortunée. Il n’y a pas d’effet transformant pour le groupe. D’autres acquisitions restent possibles, principalement dans les pays limitrophes. Mais nous privilégions la croissance organique, avec des compléments possibles. L’objectif est de renforcer les partenariats existants et de développer des solutions adaptées au marché européen.
Quels risques anticipez-vous face à la remontée des taux et comment y faites-vous face ?
Il faut prendre un peu de recul. Je ne peux pas lire l’avenir, mais les tensions sont inévitables. Un croisement des courbes avec l’Italie n’est pas à écarter. Mais il n’est pas question d’arrêter de prendre des dettes d’État. La gestion se fait à long terme et nous continuons à investir dans les obligations françaises et européennes tout en restant attentifs aux évolutions macroéconomiques et politiques. Chez Crédit Agricole Assurances, un quart du portefeuille est exposé aux dettes souveraines. Et puis, il ne faut pas oublier la puissance de la France, qui conserve une capacité financière grâce à sa taille, son appartenance à la zone euro et la confiance des investisseurs.
Quelle est votre stratégie sur l’assurance santé, notamment collective ? Quid de votre partenariat avec Noveocare dont l’actionnaire principal est désormais Harmonie Mutuelle ?
La santé – collective et individuelle – est un axe de croissance important sur les années à venir. Nous visons 2,5 millions de bénéficiaires à fin décembre 2025. Et nous y sommes déjà. Concernant Noveocare, nous travaillons intelligemment avec Harmonie. Pour l’instant, nous ne prévoyons pas de changer de gestionnaire. La balle est dans le camp du nouvel actionnaire.
Qu’en est-il de la feuille de route à venir ?
Le nouveau plan stratégique est en préparation et sera annoncé le 18 novembre. Nous consolidons nos métiers existants (épargne, assurance, retraite, santé) tout en adaptant les outils digitaux et les offres clients.
Un mot sur le pool agricole ?
Le pool de coréassurance devrait répondre aux enjeux croissants liés à la volatilité de la sinistralité, au renforcement de la résilience des assureurs et favoriser l’entrée de nouveaux opérateurs. La décision de l’Autorité de la concurrence est désormais attendue fin septembre. Initialement prévu pour un déploiement technique courant 2025, le lancement du pool est reporté à janvier 2027 au plus tôt. Mais cela ne nous empêche pas de nous développer et d'accompagner nos agriculteurs, de continuer à prendre des parts de marché, de continuer à être un acteur majeur dans la distribution d’assurances pour l’exploitation agricole. Et dans ce contexte, c’est absolument essentiel car le monde agricole est confronté à des risques climatiques et économiques croissants, qui augmentent et sont de plus en plus variés. Alors qu’avant les exploitants se protégeaient peu, aujourd’hui ils sont de plus en plus enclins à souscrire des assurances complètes pour sécuriser leurs revenus et la survie de leur exploitation.
À voir aussi

Renaud Guidée (Axa XL Re) : "L’activité de réassurance est relutive au sein du groupe"


Commentaires